Hannah Arendt, théoricienne du mal
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Qui est Hannah Arendt ?
Hannah Arendt (1906-1975), qui préférait se dire politologue plutôt que philosophe, est célèbre pour ses travaux sur le totalitarisme, notamment son essai Eichmann à Jérusalem. Rapport sur la banalité du mal, qui fit polémique en 1963.
Née à Hanovre en 1906 dans une famille juive laïque, elle est formée à la philosophie par les trois grands maîtres de la pensée allemande : Husserl, Jaspers et surtout Heidegger, qui deviendra son amant et dont elle soutiendra l’œuvre toute sa vie, bien qu’il n’ait jamais dénoncé les crimes des nazis.
Au sortir de la guerre, qui l’a contrainte à s’exiler en France puis aux Etats-Unis – où elle vit jusqu’à sa mort –, la jeune femme cherche à comprendre comment et pourquoi surgit le mal absolu et tente de retracer, dans Les Origines du totalitarisme (1951), les conditions qui ont rendu possible ce qu’elle conçoit comme une rupture de civilisation : l’avènement du nazisme et du stalinisme et de leur univers de domination, d’aliénation et d’extermination.
En 1961, Hannah Arendt se rend à Jérusalem pour le New Yorker afin de couvrir le procès du criminel de guerre nazi Adolf Eichmann, organisateur de la « solution finale », l’extermination des juifs d’Europe. Il est condamné à mort, puis pendu. En 1963, la philosophe publie ses articles, accompagnés de réflexions : Eichmann à Jérusalem. Rapport sur la banalité du mal.
Hannah Arendt suscite la controverse avec cet essai. Elle avoue avoir ri face au témoignage d’Eichmann, qu’elle voit comme un clown grotesque, ce qui est mal perçu. Et parle de « banalité » du mal, donnant, malgré elle, l’impression d’atténuer la responsabilité des auteurs de la Shoah. En réalité, la thèse d’Hannah Arendt n’est pas que le mal est banal, mais qu’il peut être commis banalement, de façon médiocre, par obéissance et absence de pensée autonome.
Si Hannah Arendt retourne quelques fois en Allemagne, dont une première fois en 1949 pour une organisation juive de restitution des biens culturels, et prend parti dans le débat sur la culpabilité collective allemande, défendant une exigence de distinction que les nazis cherchaient justement à anéantir, elle continue de vivre aux Etats-Unis. Installée dans le pays depuis 1941, elle y enseigne la philosophie et les sciences politiques dans les plus grandes universités. Elle meurt à New York en 1975.